Des attaques tous azimuts et maintenant une grève. La fronde contre les rythmes scolaires a pris une autre tournure ce jeudi, avec la première grève massive d’enseignants dans les écoles d’Aubervilliers (Seine-Saint-Denis). Selon le rectorat, deux écoles sur trois étaient fermées ou fortement perturbées dans la ville et 72% des enseignants étaient en grève. Une manifestation d’enseignants, de parents et d’animateurs a aussi eu lieu devant la mairie pour demander la suspension immédiate de la réforme.
Une nouvelle épine dans le pied du ministre de l’éducation, Vincent Peillon, qui a dû affronter un feu nourri de critiques sur ce dossier cette semaine. Mardi, le président de l’UMP, Jean-François Copé, a lancé une vaste campagne de communication pour demander un report de la réforme. Mercredi, les maires ont pris le relais en demandant «une remise à plat» du financement de la réforme et en sollicitant un rendez-vous en urgence avec le Premier ministre. Les sénateurs UMP n’ont pas été en reste, demandant une mission d’information, jugeant la réforme «intenable financièrement». Pour enfoncer le clou, la candidate UMP à la mairie de Paris, Nathalie Kosciusko-Morizet, a indiqué ce jeudi avoir reçu plus de 500 réponses sur le site nosenfantsmeritentmieux.fr, lancé en début de semaine pour faire remonter les commentaires de la réforme. Et sur les réseaux sociaux, la fronde s’organise aussi. Sur Facebook, le groupe «Rythmes scolaires: arrêtez le massacre» comptait déjà 1.303 membres ce jeudi.
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Des tensions fortes au niveau local
Reste à savoir si ces charges tous azimuts contre la réforme vont contribuer à allumer le feu dans les écoles et si l’exemple d’Aubervilliers fera tache d’huile. Une hypothèse à laquelle ne croit pas Christian Chevalier, secrétaire général du SE-Unsa: «On aura forcément des poussées de fièvre dans certaines communes, où la mise en œuvre de la réforme n’a pas donné lieu à un vrai dialogue entre tous les acteurs. Mais je ne crois pas à un embrasement national, car nous recevons aussi beaucoup de témoignages positifs. Dans la plupart des communes, même s’il reste des calages à faire, les enfants bénéficient de vraies activités sportives et culturelles qu’ils n’avaient pas avant».
Même son de cloche chez Sébastien Sihr, secrétaire général du SNUipp-FSU: «Il y aura des tensions dans certaines communes comme à Aubervilliers, où il faudra remettre l’ouvrage sur le métier. Mais je ne pense pas qu’il y aura un mouvement généralisé.» Paul Raoult, président de la FCPE (première fédération de parents d'élèves), n’imagine pas non plus une grève massive sur le sujet: «Face à la déferlante médiatique, de plus en plus de parents nous appellent ces derniers jours pour nous dire que la mise en place des nouveaux rythmes ne se passe pas si mal. Il ne faut donc pas jeter le bébé avec l’eau du bain.»
Pour sortir de l’impasse et ne pas voir la situation s’enflammer, Sébastien Sihr juge cependant nécessaire que Vincent Peillon revoie sa copie. «Nous demandons la réécriture du décret sur les rythmes scolaires afin de lui donner plus de souplesse. Il faut donner plus de latitude aux conseils d’école sur ce dossier et ne pas laisser les maires décider seuls de leur côté». Pour Christian Chevalier, il est aussi «urgent de revoir l’application de la réforme dans les maternelles, car l’organisation actuelle n’est pas adaptée». Dans les villes où les tensions sont déjà fortes sur ce dossier, certains maires n’auront donc pas d’autre choix que de se remettre autour d’une table avec les animateurs, les enseignants et les Dasen (directeurs académiques des services de l'Education nationale) pour éteindre le début d’incendie.

